Technique

Choix du bon gréement pour le vent du jour

La première chose à faire, et qui prime sur toute autre considération de réglage, est de choisir le bon gréement pour le vent du moment. En première approche, le gréement optimal pour remonter au vent est celui qui donne un angle de gîte de 30 à 35 degrés. Si le bateau gîte moins, il est sous toilé, et s’il gîte plus, il est surtoilé. Le plus souvent, pourtant, les conditions ne sont pas constantes et dans ce cas être un peu surtoilé dans les risées est un compromis acceptable.
Idéalement, l’angle de gîte ne devrait jamais excéder 45 degrés. En tout cas, virer quand le bateau gîte ainsi est très hasardeux. Cela freine le bateau terriblement car on doit jouer sur le safran qui agit sur un plan vertical plutôt que sur un plan horizontal – çà a pour effet d’enfoncer dans l’eau l’arrière du bateau. Et alors, très souvent, on finit bloqué, bout au vent.
Si en revanche, le bateau gîte moins que 30 degrés dans les risées, c’est qu’il est probablement temps de choisir un gréement plus grand, si c’est possible. Essayez donc de choisir le gréement qui permet au bateau de remonter au vent avec un angle entre 30 et 35 degrés de gîte avec les voiles réglées de façon optimale.
Si le vent soufflait de façon régulière, ce serait assez facile de choisir le bon gréement. Ce n’est malheureusement pas le cas. Le plus souvent, on vrille les chutes ou fait faseyer les voiles pour soulager le gréement dans les risées, mais si vous devez naviguer de cette façon sans arrêt, alors c’est qu’il faut choisir un grément moins puissant. Le bon gréement, bien réglé, est toujours plus efficace qu’un gréement plus puissant que l’on soulage. La difficulté c’est que le gréement plus petit va être très sous toilé dans les molles si vous choisissez trop tôt un gréement plus petit.
Connaître les conditions exactes à partir desquelles vous devez changer de gréement est donc de la plus haute importance. C’est bien sûr en grande partie une question d’expérience, mais il y a deux trois choses que vous pouvez faire pour mettre les chances de votre côté et prendre la bonne décision.
La première chose est de s’équiper d’un anémomètre et de l’utiliser souvent. Mesurer systématiquement le vent jusqu’à ce que vous sachiez estimer sa vitesse à 10% près. Puis utilisez-le occasionnellement juste pour vérifier votre estimation. La seconde chose est d’essayer plusieurs gréements au cours de sorties de réglage, notamment quand vous vous posez la question si un autre gréement serait plus efficace. Plus vous expérimentez, plus vous naviguez, et meilleur sera votre prise de décision.
Au portant, le meilleur gréement sera le plus grand que vous pouvez supporter tout en gardant le contrôle du bateau dans les surventes sans plonger l’étrave dans l’eau. Un bateau sera plus rapide s’il ne tente pas de faire le sous-marin.
Si le bon gréement pour le près, ne convient pas pour le portant c’est qu’il y a un problème de conception du bateau. Prenons un classe M qui dispose d’un lest de 4 kg. Ce bateau sera raide à la toile au près à des vents bien supérieurs en force à ceux qui le transformeront en sous-marin au portant, sauf à ce qu’il ait une étrave très volumineuse. De la même façon, un M normal avec seulement 2kg de lest manquera à virer avec son grand gréement dans 5 nœuds de vent alors qu’il supportera sans problème des vents beaucoup plus forts au portant. C’est l’architecte qui guide ce choix de faire un bateau suffisamment raide pour supporter un gréement donné au près et de pouvoir supporter ce même gréement aux allures portantes. Notez bien que de nombreux modèles de bateaux peuvent remplir cette double condition. Cela dépend du rapport entre la force qui tend à faire plonger l’avant de la coque et la poussée d’Archimède qui s’exerce sur l’étrave de la coque combinée au couple de rappel. Généralement, plus le bateau est raide à la toile, plus il lui faut du volume de flottabilité à l’avant. Le plus souvent, on ne peut pas faire grand chose si un bateau est trop raide ou pas suffisamment. Exception faite quand le déséquilibre est léger et où quelques grammes de lest ajoutés ou retranchés ici ou là peut permettre de retrouver l’équilibre du bateau. De grandes modifications sont déconseillées, il y a toutefois des exceptions.

Angle de gite & force du vent selon le gréement

Je suis de l’avis que l’on a besoin de quatre gréements au moins pour couvrir le spectre des conditions de vent que vous allez rencontrer, à savoir de 0 à 30 noeuds.

  • Le plus grand des gréements doit être optimisé pour 7 noeuds de vent environ et supporter des risées à 10 noeuds.
  • Le second gréement doit être optimisé pour 10 noeuds de vent avec des risées à 15 noeuds.
  • Le troisième gréement doit être efficace à 15 noeuds et supporter des risées à 22 noeuds.
  • Le quatrième gréeement est un gréement réduit de gros temps ; il doit être efficace à 20 noeuds et pouvoir tenir dans des risées de 30 noeuds. .

Généralement vous constaterez que le gréement de gros temps a un mât dont la longueur est à peu près égale à celle du bateau. Si vous naviguez régulièrement dans plus de 30 noeuds, vous aurez besoin d’un gréement encore plus petit.
Si cela vous semble beaucoup de gréements, demandez donc à un skipper de vraix bateaux combien de fois il change de voiles entre 0 et 30 noeuds. La plupart des bateaux de régate nécessitent un nombre équivalent de changement comme nos bateaux radiocommandés. Cela vient du fait que la pression augmente d’un facteur 100 entre 3 et 30 noeuds. Si on représente sur un graphique l’angle de gîte selon la force du vent de 0 à 30 noeuds, pour nos gréements optimisés, on constate d’abord que entre 10 et 50 degrés de gîte, la courbe est presque en ligne droite. Notez bien le chevauchement entre les gréements, là où on peut utiliser indifféremment l’un ou l’autre des gréements. Ceci est indispensable du fait des variations de la force du vent, et cela facilite le choix du bon gréement.

Gréement inadapté pour le peu de vent de ce jour.


La plupart des skippers ne changeront de gréement que quand le bateau devient incontrôlable au portant. Je pense que nous gardons le gréement A bien trop longtemps. Au près, la gîte excessive altère la conduite du bateau. Elle accentue la dérive latérale, parce que la dérive ne travaille pas efficacement du fait de la gîte. Cela accentue les turbulences car la force qui s’exerce sur les voiles est orientée vers le bas et enfonce la coque dans l’eau comme si le bateau était plus lourd. Au portant, le bateau a tendance à enfoncer son étrave dans l’eau et cela augmente la resistance à l’avancement considérablement. Ceci peut déclencher un cercle vicieux où l’excès de turbulence vous fait modifier le réglage des voiles, qui accroît les forces qui enfoncent le bateau dans l’eau, qui le font plonger au point d’arreter le bateau, ce qui fait sortir le safran de l’eau, le bateau part alors au lof ou se met bout au vent. Alors qu’avec un gréement plus petit, le bateau se comportera beaucoup mieux du fait d’un meilleur équlibre, tandis qu’au près, le meilleur équilibre va réduire la dérive et le vmg sera meilleur. Dans tous les cas, si vous avez du mal à contrôler le bateau ou que vous plongez au largue de façon excessive, CHANGEZ DE GRÉEMENT. On ne peut pas régater si on ne contrôle pas son bateau. Il vaut beaucoup mieux aller un peu moins vite (ce qui est rarement le cas) que de se retrouver bloqué bout au vent, ou pire de noyer son recepteur. Rappelez-vous que pour gagner, il faut terminer la manche

Source : Canadian Radio Yachting Association Bob Sterne article original 2002