Technique

L’interaction des voiles entre elles et le réglage fin du foc

Je suis certain que vous savez tous que si vous modifiez le réglage d’une des deux voiles, cela affecte les deux voiles du fait de l’interaction qui existe entre elles. Je ne crois pas cependant que la plupart d’entre vous sache comment ces interactions se font vraiment, mais je suis sûr que si vous en comprenez les bases, vous serez bien plus à même de régler votre bateau.

Voici un point préliminaire discuté longuement avec Bertrand CHERET qui a écrit des ouvrages passionnants sur les voiles et les gréements : Lorsque le bateau et son gréement fractionné avance sur l’eau au près, il pousse l’air qui est devant lui. L’air contourne alors le bateau, le flux qui atteint le foc est alors dévié et il est plus adonnant. Il va ensuite accélérer sur la face sous le vent des voiles ce qui provoque une succion qui va résulter en une force dont une composante propulsive fait avancer le bateau et l’autre latérale qui va le faire gîter et le faire dériver. Si le couloir entre la grand voile et le foc est trop fermé, l’air qui ne peut passer dans la fente, passe devant le mât et aspire la partie de la grand voile juste derrière le mât ce qui donne l’impression que le foc « renvoie » dans la grand voile.

Oublions d’abord cette idée que le foc accroît l’efficacité de la grand voile. En effet, l’air qui s’écoule sur l’extrados de la grand voile (sa partie sous le vent), s’écoulerait bien plus vite si il n’y avait pas de foc. En fait le foc décroît la puissance de la grand voile, et plus le couloir est fermé et plus cette décroissance est grande. C’est exactement l’inverse qui se produit pour le foc. Le flux d’air de son extrados est accéléré bien plus que si la grand voile n’était pas présente. C’est en fait la grand voile qui accroît la puissance du foc. De plus, du fait de leur proximité, le foc va naviguer dans un air plus adonnant, car l’air en avant du bateau est “poussé” par le bateau qui avance et qu’il va contourner le gréement ; la grand voile va, elle, naviguer dans un flux d’air plutôt refusant. Cela parait fou, mais la grand voile doit être bordé plus au centre du fait de la présence du foc, qu’elle ne le serait s’il n’y avait pas de foc. Il en résulte que le foc produit une force propulsive plus efficace, et peu de force de gîte, alors que la grand voile génèrera moins de force propulsive et plus de force pour faire gîter le baeau. Finalement, au près, le foc est plus efficace que la grand voile. Avant que vous vous disiez, je laisse tomber ce gréement fractionné pour un gréement à foc seul laissez moi vous dire que si la grand voile n’était pas là, le foc seul ne serait qu’une piètre voile. Ce que la grand voile perd en performance, est récupéré par le foc. De plus, la flux d’air qui est accéléré par le foc et sa capacité à naviguer dans un air adonnant, stabilise les voiles et les retient de fasseyer, alors que la pression réduite sur la grand voile qui résulte du couloir, et le vent refusant qu’elle rencontre, évite au flux d’air de décrocher. Finalement, l’interaction des deux voiles ont plus de courbure (vue de dessus), et de ce fait plus de puissance, et permettent de pointer dans le vent beaucoup mieux qu’une seule voile plus grande.

C’est crucial de penser que les deux voiles forment une aile unique qui a une grande marge de réglage. Gardez à l’esprit, toutefois, que le foc joue un rôle primordial pour faire avancer le bateau. A tout moment, il faut éviter que le foc décroche ou qu’il soit trop bordé. Utilisez des penons et regardez les attentivement. Il y a des fois où on veut faire décrocher la grand voile ou la garder surbordé toutefois, et on va y revenir. Mais à présent, voyons ce à quoi s’attendre quand on modifie un réglage soit de la grand voile, soit du foc. Dans les deux cas, je pars du principe que votre bateau est correctement réglé. Et dans chaque cas je vais décrire la modification que vous faîtes à la voile et l’effet que cela a sur l’autre.

Choquer la grand voile

Quand on choque la grand voile, on modifie l’action des forces sur la grand voile vers l’avant. Vous allez donc réduire la gîte et augmenter la vitesse. C’est très pratique dans les risées quand il y a des conditions musclées et si votre gréement est trop grand et que vous voulez garder le contrôle du bateau. Cela va réduire la tendance à lofer du bateau, et vous réduisez la dérive parce que le bateau gîte moins. La puissance du foc va décroître et les deux voiles vont peut-être faséyer – ce qui va vous obliger à abattre pour garder de la vitesse. En d’autres termes, on ne peut plus pointer autant avec la voile choquée. Mais en revanche le bateau gîtera moins.

Border la grand voile

C’est le cas opposé. Quand vous bordez la grand voile, vous accentuez la gîte et réduisez la force propulsive du gréement. Le bateau devient plus ardent, et la dérive latérale augmente. La puissance du foc augmente et les deux voiles peuvent décrocher. Il faut alors pointer plus haut dans le vent, et cela réduit la vitesse. Border trop la grand voile, doit donc être évité en dehors des situations où il faut pointer un maximum dans le vent. Gardez à l’esprit que vous ne pouvez pas naviguer bien longtemps dans ce mode, quelques longueurs tout au plus, avant que la vitesse ne décroisse et que la dérive augmente au point de plus perdre de terrain que d’en gagner. Dans les petits airs, il ne faut pas chercher à pointer du tout.

Le réglage fin du foc (GIZMO, BRESMO, etc.)

En choquant le foc vous accroîssez sa puissance, et vous réduisez la gîte tout comme c’était le cas pour la grand voile. En plus cela va accroitre le flux sur l’extrados de la grand voile, cela va accroitre sa puissance et la gîte du bateau. La moindre gîte causée par le fait de choquer le foc, et la gîte prononcée par l’effet sur la grand voile se compensent à peu près ; le résultat est que la puissance du gréement est accrue quand vous choquez le foc. Le piège est que la grand voile va naviguer dans un vent apparent qui vient moins de l’avant et qu’elle va avoir tendance à décrocher. De plus le bateau va devenir plus ardent car le centre de poussé vélique recule. C’est exactement ce que vous désirez dans les petits airs du moment que vous ne fassiez pas décrocher la grand voile. Vous aurez peut-être besoin d’abattre pour évider que le foc ne faseye.

Border le foc

C’est la situation opposée où la force propulsive du foc diminue et la gîte qu’il génère augmente. La succion sur l’extrados de la grand voile va être réduite, ce qui va diminuer la gîte et la force propulsive de la grand voile. La grand voile va évoluer dans un vent apparent venant plus de l’avant, le foc peut renvoyer dans la grand voile, en formant comme une bulle juste derrière le mât. Cela va réduire la gîte du bateau et la force propulsive générée par la grand voile. Le centre de poussé vélique va se déplacer vers l’avant, le bateau va devenir beaucoup moins ardent. Le gréement est moins puissant sans que cela affecte sa capacité à remonter au vent. On peut même pointer très haut du moment que le vent est suffisamment soutenu pour conserver de la vitesse.

A ce stade, vous avez une idée assez claire sur l’impact des modifications de réglages d’une des voiles sur l’autre et l’effet sur le bateau et cela va vous éclairer sur la façon d’exploiter cela pour régler le bateau dans différentes conditions. C’est ce qui soustend ce que l’on fait quand on règle le foc – c’est le règlage fin du foc. Il ne faut pas se reposer là dessus pour corriger un mauvais réglage du gréement. Votre bateau doit être correctement réglé pour les conditions du jour et le régalge fin du foc n’est là que pour s’adapter aux conditions changeantes sans avoir à changer de gréement, ou sa position, alors qu’en jouant sur le foc on peut s’adapter. Une exploitation judicieuse du réglage fin du foc va vous permettre de le choquer dans les petits airs, ou de le border plus dans les risées. Ce réglage ne devrait jamais être maintenu à son max dans un sens ou dans l’autre. On touche à son intérêt majeur qui est de trouver le bon compromis entre grand voile et foc au cours de session de réglage. Quand on a trouvé le bon réglage, on fait les ajustements de façon que ce réglage fin se trouve au milieu de la plage de réglage du mécanisme.

Un mot enfin sur l’utilisation du réglage fin du foc. Ayez à l’esprit que tout changement à l’écoute du foc nécessitera une modification de la trajectoire du bateau pour éviter que le foc ne faseye ou ne décroche. En plus des penons de foc, vous devriez avoir des penons dans la grand voile au milieu. Quand les voiles sont bien réglées, tous les penons doivent être collés. Si vous associez le réglage fin du foc avec le réglage du winch, vous pouvez soulager la voile en bordant d’abord le foc, puis en choquant les deux voiles et enfin en remettant le réglage fin du foc à la position neutre. Dans les claques, vous pouvez naviguer avec la grand voile qui faseye et son penon au vent décroché. En inversant la procédure, vous pouvez border la grand voile jusqu’à ce qu’elle soit sur le point de décrocher et pointer au maximum, mais pas longtemps. Le réglage fin du foc est sans doute le dispositif le plus facile à apprendre et associé à des penons dans les voiles, c’est un outil magique à toute épreuve. 

Source : Canadian Radio Yachting Association – Bob Sterne – article original 2002

Un commentaire

  • woolfi

    il suffit de mettre un réglage de foc, ça fait près de 40 ans que on l’utilise. je suis le seul à l’avoir gardé!